Pleins feux sur Germaine Nadon :

Vivre seule avec un myélome

Juillet 2023

Germaine Nadon

Mon nom est Germaine Nadon, je vis seule et suis atteinte d’un myélome. Au moment de mon diagnostic, j’habitais à Kelowna en Colombie-Britannique. Il y avait, dans ma région, un centre de cancérologie qui offrait certains traitements, mais aucune option de greffe.


En juin 2014, après une année de fatigue extrême et d’anémie, mon taux de calcium a atteint un niveau inquiétant.

Au départ, les médecins craignaient que mes symptômes soient liés à une hyperthyroïdie, mais en raison de l’hypercalcémie, mon médecin généraliste et mon endocrinologue étaient quasi convaincus que j’étais atteinte d’un myélome multiple.

Je me souviens avoir demandé au médecin généraliste s’il était certain de lire les résultats de mon bilan sanguin.


J’aurais souhaité qu’il y ait une erreur, mais il s’agissait bel et bien de mes résultats. On m’a immédiatement prescrit du pamidronate afin de réduire mon taux de calcium et j’ai subi une biopsie de la moelle osseuse. Deux semaines plus tard, mon oncologue m’a convoqué à son bureau pour m’annoncer une nouvelle qui allait changer ma vie; j’étais atteinte d’un myélome multiple à chaînes légères lambda de stade 1.

Certaines de mes statistiques,

décembre 2014

J’avais alors 63 ans.


À vrai dire, les semaines qui ont suivies semblent encore floues alors que j’essayais tant bien que mal d’absorber la nouvelle, d’accepter le diagnostic, de concilier ma vie professionnelle et mes rendez-vous médicaux et de gérer ma fatigue extrême. J’avais l’impression de ne plus avoir aucun contrôle sur ma vie.

Comme je vivais seule, la première étape consistait à organiser un réseau de soutien; qui pouvait m’aider et avec quelles tâches : repas, suivi des rendez-vous, transport, médicaments, effets secondaires, finances, déplacements, etc.

À Kelowna, j’ai suivi un traitement CyBorD (cyclophosphamide et bortézomib) pendant trois mois. Après mon premier traitement, j’ai souffert d’une lésion de l’oreille interne gauche qui a provoqué des problèmes d’équilibre (impact sur mon équilibre du côté gauche) et j’ai aussi développé une gastroparésie. Ces effets secondaires persistent encore aujourd’hui. J’ai suivi plusieurs séances de physiothérapie et fait divers exercices visuels pour atténuer mes problèmes d’équilibre, et aujourd’hui, je suis fière de rapporter que, la plupart du temps, je peux me déplacer sans déambulateur ou dispositif d’aide à la marche. Il fut établi, beaucoup plus tard, que j’avais eu une réaction toxique au bortézomib.

En tant que résidente de la Colombie-Britannique, la seule option pour subir une greffe de cellules souches était à titre de patiente externe à l’Hôpital général de Vancouver en Colombie-Britannique. J’ai présenté une demande pour subir ma greffe de cellules souches à Calgary (afin d’être plus près de ma fille), mais ma demande a été refusée puisque je n’étais pas une résidente de l’Alberta. Un déménagement ne pouvait pas être envisagé à ce moment.

Comme patiente externe, je devais être accompagnée en tout temps. Mes filles avaient de très jeunes enfants à l’époque, et ne pouvaient donc pas m’accompagner. Trois amies ont offert de m’accompagner et de prendre soin de moi après ma greffe de cellules souches.


En novembre 2014, mon amie et moi avons voyagé par avion à Vancouver. Nous avons séjourné au Jean Barber Cancer Lodge à deux pâtés de maisons de l’hôpital. Notre séjour n'a pas été gratuit.

Ma fille Kristie (Kris) s’est rasée les cheveux

pour me soutenir, novembre 2014

J’y ai passé 10 jours durant la préparation et le prélèvement de mes cellules souches, puis je suis revenue à Kelowna jusqu’à ce qu’on soit prêt pour ma greffe.

Avec mon cathéter de Hickman,

novembre 2014

Branchée à l’appareil d’aphérèse pour le prélèvement de mes cellules souches, Vancouver, novembre 2014

Au Jean Barber Cancer Lodge,

décembre 2014


En décembre, mon amie et moi avons repris un vol pour Vancouver. J’y ai passé 4 semaines pour subir ma greffe de cellules souches et reprendre mes forces.


L’unité de greffe de cellules souches était ouverte tous les jours de 7 h à 19 h. Ainsi, pour tout problème en dehors de ces heures d’ouverture, je devais me rendre au service des urgences de l’Hôpital général de Vancouver.

J’ai eu à visiter le service des urgences à plus d’une reprise en raison de fièvres élevées et pour une transfusion de plaquettes.

Mais… bonne nouvelle!

Après la greffe, j’ai connu une période de rémission. Aucun médicament d’entretien n’a été recommandé à ce moment. 

Pour la dernière semaine de mon séjour, nous avons dû nous installer dans un hôtel de la région puisque le Jean Barber Cancer Lodge fermait ses portes pendant deux semaines pour la période des Fêtes. Les repas et le transport aller-retour entre l’hôtel et l’hôpital posaient un défi, mais notre résilience nous a aidés à passer au travers! J’ai reçu mon congé à 19 h le 24 décembre et j’ai dû organiser mon retour à la maison le jour de Noël.

Il fut très difficile de gérer tous les effets secondaires de la greffe et de composer avec le fardeau financier que cela posait. J’ai conservé mon appartement à Kelowna tout en assumant les dépenses pour les repas, l’hébergement et le transport à Vancouver pour moi-même et mes proches aidants. Heureusement, Hope Air a offert, sans frais, des vols allers-retours de Kelowna à Vancouver pour moi et ma proche aidante. J’étais responsable de débourser les frais d’hébergement, de repas, et de médicaments d’ordonnance, ainsi que les coûts imprévus.


Je me souviens d’avoir été réellement sous le choc lors d’une visite à la pharmacie pour faire remplir une prescription reçue par l’unité de greffe. Le pharmacien m’avait demandé si je connaissais le prix du médicament et en apprenant qu’il en coûterait 2 500 $ par dose, que j’aurais besoin de deux doses et que le médicament n’était pas couvert par mon assureur.


J’ai fondu en larmes.


Je ne savais pas comment j’allais pouvoir couvrir ces frais. Le pharmacien a été d’une compassion exemplaire. Il a réussi à convaincre la société pharmaceutique d’approuver le remboursement du médicament en vertu de son programme d’accès par compassion. En guise de reconnaissance, j’ai fait don de mes doses non utilisées à l’unité de greffe de cellules souches afin d’aider d’autres patients.

Pour maintenir un équilibre entre les bons et moins bons moments, je m’accordais 5 minutes par jour pour m’apitoyer sur mon sort. Les jours où cela n’était pas nécessaire, j’accumulais ces périodes de 5 minutes pour les jours où plus de 5 minutes étaient nécessaires.

Et en effet, quelques journées ont été beaucoup plus difficiles.


Me permettre de m’apitoyer sur mon sort pendant quelques minutes m’a aidé mentalement à me concentrer sur des choses plus positives. 

Mon réseau de soutien m’a entouré d’amour, a organisé des collectes de fonds, des ventes-débarras, et m’a offert un soutien physique pour m’aider à traverser cette période difficile.


Je suis infiniment reconnaissante envers toutes les personnes qui m’ont aidée.

Ma sœur Jackie s’est également

rasé les cheveux par solidarité

J’avais constamment l’impression d’avoir le « cerveau embrouillé ». Pour maintenir mon cerveau actif, j’ai créé des tableaux pour enregistrer mes doses de médicaments et je me suis inscrite à un cours en ligne. En 2015-2016 un groupe de soutien pour les personnes touchées par un myélome a été créé à Kelowna. Je me suis portée volontaire pour diriger ce groupe, et avec l’aide de Michelle Oana de Myélome Canada, nous avons pu y tenir la première Marche Myélome Multiple en 2016. 

Même si j’étais en rémission, je savais que je devais me préparer à une éventuelle rechute, et cela supposait de devoir déménager à Calgary en Alberta ou à Saskatoon en Saskatchewan afin de pouvoir bénéficier du soutien de ma famille.

En préparation à mon déménagement, voici ce que j’ai dû faire :


  1. J’ai avisé mon oncologue 8 mois avant la date prévue de mon déménagement de sorte que ma demande puisse être déposée et acceptée dans la nouvelle province. 
  2. J’ai effectué des recherches pour savoir dans quelle province le plus grand nombre de médicaments pour traiter le myélome étaient remboursés.
  3. J’ai identifié la province qui avait le plus grand nombre de ressources en oncologie.
  4. J’ai fait la demande pour une nouvelle couverture des soins de santé dans ma nouvelle province (l’Alberta).

Mes traitements et médicaments, comme mes IgIV (transfusions d’immunoglobulines) mensuelles, devaient être préapprouvés par BC Medical pendant les trois premiers mois qui ont suivi mon arrivée en Alberta (soit jusqu’à ce que ma couverture de soins médicaux entre en vigueur en Alberta).

J’ai trouvé un logement et suis déménagée à Calgary au mois de mai 2017, puisque j’avais été acceptée par l’équipe d’oncologie au Tom Baker Cancer Center. La solide équipe d’oncologie me prodigue des soins exceptionnels depuis. 

Pour célébrer ma rémission, ma sœur et moi avons fait

un voyage transcanadien en voiture d’Edmonton (Alberta)

à St. John’s (Terre-Neuve)!


Nous vivons décidément dans un pays magnifique et diversifié.

Au mois de juin 2019, l’inévitable s’est produit, et j’ai fait une rechute.


Au cours de l’année de ma rechute, mes protéines monoclonales sont passées de 0 à 20. Deux mois avant ma rechute, j’ai ressenti des symptômes semblables à ceux de la grippe, ainsi qu’une fatigue extrême.


La semaine où j’ai fait ma rechute, je me suis rendue deux fois à l’unité de greffe pour une hydratation intraveineuse. En tenant compte de mon taux de protéines monoclonales, de mes analyses sanguines et du fait que je ne me sentais pas bien, il fut déterminé que j’étais en rechute.

Après 26 traitements de chimiothérapie (daratumumab/ revlimid/ dexaméthasone), j’ai atteint un « état stable » au mois de septembre 2021. Mes oncologues utilisent toujours ce terme avec moi…Pour moi, un état stable signifie que mes protéines monoclonales se situent entre 1,7 et 3,0.


Je dois encore gérer les effets secondaires des médicaments, toutefois je jouis d’une certaine qualité de vie qui me permet de vivre de beaux moments avec mes quatre petits-enfants.

En compagnie de trois de mes quatre petits-enfants :

Cadie, Sasha et Eddie

Il était important pour moi de garder mon cerveau actif. En octobre 2018, j’ai rejoint la Southern Alberta Myeloma Patient Society (SAMPS) à titre de secrétaire bénévole. Après deux ans, j’ai pris les rênes à titre de directrice sans pouvoir décisionnel afin de me donner le temps de composer avec d’autres problèmes de santé, puis en septembre 2021, j’ai repris mon rôle de secrétaire par intérim jusqu’au moment de ma démission en mars 2023.

Au moment de mon diagnostic, on m’avait dit que mon espérance de vie était de 3 à 5 ans, et puis de 5 à 8 ans. En juillet, j’ai célébré neuf ans depuis le début de mon parcours avec le myélome.

Chaque jour est un cadeau enrichi par toutes les personnes qui ont touché ma vie et m’ont offert amour, soutien, et soins.


Je tiens à remercier particulièrement mes deux filles Deanna et Kristie, leurs conjoints, les parents de leurs conjoints et mes quatre petits-enfants qui ont toujours été à mes côtés et qui se sont serré les coudes sans hésiter. De plus, j’aimerais également remercier Myélome Canada pour ses nombreuses ressources (le savoir est un outil puissant) et son soutien continu. 

Deanna, Elise et Sasha à la Marche Myélome Multiple de Saskatoon en 2017

Et maintenant, je suis en route vers Invermere en Colombie-Britannique pour célébrer ma vie avec ma famille!


C’est tout à fait merveilleux!


Germaine

Note du rédacteur : Germaine et Anna Giulione (infirmière au Tom Baker Cancer Centre) ont gentiment accepté d’animer un webinaire pour Myélome Canada le 27 juin 2023 intitulé « Vivre seule avec un myélome ». Nous les remercions pour leur temps et leurs paroles inspirantes. Si vous n’avez pu y assister, sachez que le webinaire a été enregistré et que vous pouvez le visionner sans frais sur la chaîne YouTube de Myélome Canada, ou vous pouvez cliquer ici pour accéder directement à l’enregistrement (offert en anglais seulement).

Pour trouver un groupe de soutien dans votre région, ou pour savoir comment en créer un, cliquez ici ou communiquez avec Michelle Oana, directrice du développement et relations communautaires à moana@myelome.ca.

Nous espérons que vous apprécierez rencontrer nos étoiles de la rubrique « Pleins feux » en 2023 et les autres membres de la communauté de Myélome Canada. La rubrique « Pleins feux » de notre infolettre « Manchettes Myélome » présente le témoignage et les réflexions de membres de notre communauté, qu’ils soient patients, proches aidants ou professionnels de la santé. Les opinions exprimées et partagées sont celles de la personne qui s’exprime. Nous reconnaissons que le parcours et l’expérience de chacun sont différents. 


À vous tous qui avez partagé votre témoignage par le passé, ainsi qu’à ceux qui le font encore aujourd’hui, nous vous sommes reconnaissants… vous êtes une source d’inspiration.  


Si vous souhaitez partager votre expérience dans une prochaine édition de « Manchettes Myélome », veuillez nous écrire à contact@myelome.ca.

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